Je suis professeur en CPGE, et je souhaite partager mon récit, une expérience marquante de harcèlement moral persistant qui a débuté il y a quatre ans. Cette période a été ponctuée par une série d’attaques de la part d’une proviseure, d’une collègue et d’un secrétaire.
Tout a commencé juste avant le confinement de 2020. Profitant de mon absence pour l’accueil de mon enfant, une collègue indélicate a lancé des rumeurs destructrices sur mon travail, diffusant ces calomnies aux collègues, aux élèves et à la direction.
Malgré mes multiples tentatives de conciliation et mes signalements, la proviseure a relayé ces mensonges, déformé mes propos, et inventé d’autres accusations. Aucune action concrète ni enquête n’a été entreprise depuis 2020, laissant mes harceleurs impunis et renforçant leur comportement nocif. Les attaques ont persisté, devenant plus violentes à mesure que je tentais de me défendre.
Un schéma s’est installé : être accusé de fautes dont mes harceleurs étaient coupables, tels que l’incompétence pour la proviseure et la malhonnêteté pour la collègue. À ce harcèlement s’est ajouté celui d’un secrétaire, créant une atmosphère toxique.
Je voulais signaler des menaces de mort en ligne dirigées contre plusieurs collègues en 2020, minimisées et tues par la proviseure et des collègues indélicats, le tout dans le contexte tragique de l’assassinat de Samuel Paty. Mes efforts pour signaler des dysfonctionnements dans l’établissement ont révélé l’absence d’un registre de santé et sécurité au travail (RSST) et le manque de protection de la part de mes supérieurs hiérarchiques. Lorsque j’ai pu compléter ce registre, mon signalement a été annoté par la proviseure, sans qu’aucun suivi ne soit assuré sinon une convocation pour « recadrage » au rectorat.
L’administration et la plupart des collègues m’ont abandonné à mes bourreaux.
J’ai également signalé des accusations infondées portées à mon encontre, allant du détournement de fonds publics à l’agressivité, le sexisme, l’incompétence et le manque d’éthique professionnelle. La violence des personnes que je signalais a atteint un point tel que j’ai dû porter plainte pour diffamation, puis pour harcèlement.
La collègue à l’origine des rumeurs a été depuis promue aux plus hautes fonctions du corps professoral. La proviseure a été décorée de la légion d’honneur, profitant d’une retraite bien méritée. Il reste le secrétaire, dont le pouvoir de nuisance est minimisé et renforcé par l’inaction.
Ma carrière et ma réputation ont été détruites par des accusations mensongères, de la diffamation publique et des menaces. Sans aucun droit de réponse, je me suis retrouvé isolé, ostracisé, méprisé. Ma demande de protection fonctionnelle en 2021 n’a même pas été instruite, ma demande de maladie professionnelle contractée dans ce contexte harcelant a été « perdue » par le rectorat pendant un an, puis refusée en dépit des preuves et du bon sens. Ceci fait l’objet d’un recours contentieux administratif.
Rien n’a été fait par ma hiérarchie et l’administration, sinon des tentatives d’intimidation, un refus systématique de me protéger ou de reconnaître la situation dont j’ai été victime et une volonté de protéger mes harceleurs. Aucune mesure de mutation ne m’a même été proposée pour m’extraire de là. Forcé de revenir dans le lieu où on m’a fait subir cela, ma carrière, ma réputation et ma santé mentale sont gravement affectées.
Je voudrais sensibiliser le public sur la maltraitance institutionnelle dans l’Éducation nationale.
Après un mois de reprise contrainte et forcée (j’ai été menacé d’être rétrogradé) dans ce lieu de souffrance, la perspective d’une nouvelle phase de souffrance se dessine, ravivant mes craintes. Je me sens désarmé face à une inertie administrative qui semble avoir atteint ses limites pour de nombreux professeurs qui aimeraient consacrer leur énergie à leur passion. Tous les jours, je croise ceux qui ont encouragé ces agissements harcelants par leur lâcheté, par leur inaction.
Seul professeur d’anglais pour toute la prépa, j’aime mes élèves, mais que puis-je seul contre la rumeur, la diffamation, les menaces ? Et je suis laissé à l’abandon devant les agissements de ce secrétaire qui poursuit son travail de sape en « perdant » mes demandes de mutation ou mes documents, en m’accusant publiquement d’avoir des arrêts-maladie de complaisance ou de l’avoir agressé dans la rue au moment où il apprenait mon retour forcé au lycée. Le schéma diffamatoire se reproduit encore, avec désormais la mauvaise foi d’un élève qui n’a pas apprécié d’être recadré en classe, qui s’appuie sur ma « réputation » acquise en mon absence. Il a décidé de m’accuser de menaces physiques et m’a menacé de plainte pénale. Sans protection fonctionnelle, sans reconnaissance d’accident de service, je suis totalement impuissant et isolé, obligé de reprendre cet élève en cours…
De son côté, le rectorat opère désormais des « retenues sur salaire » qu’il refuse de me justifier, me refusant l’accès à mon dossier administratif.
Mon témoignage vise à susciter une prise de conscience, dans l’espoir que la presse puisse être le catalyseur d’une action qui, peut-être, m’aidera à retrouver sérénité, justice et équilibre pour moi-même et mes proches. J’ai écrit par voie hiérarchique au nouveau ministre, qui se prétend sensible au harcèlement, avec pour seule réponse un transfert de ma demande au rectorat. Merci, mais non merci.
Le harcèlement est un délit. Ne pas agir, c’est être complice. Ne pas dénoncer, c’est participer. Voilà ce qui explique l’hostilité quasi-générale de mon entourage professionnel à mon endroit dans cette cité scolaire parisienne naguère synonyme de résistance à l’ennemi.
— Supérieur, 15 ans d’ancienneté