L’école va mal, les enseignants aussi !

Ces témoignages m’ont beaucoup touchée et je voudrais apporter le mien sous couvert d’anonymat.

Je suis enseignante en élémentaire depuis 25 ans.
D’abord en ZEP en Seine-Saint-Denis, puis en milieu rural depuis 15 ans.
Le constat est le même : amer.

Les conditions de travail se dégradent : exigences institutionnelles démesurées, tâches administratives chronophages, formations infantilisantes durant lesquelles l’enseignant est invité à se former lui-même à l’instar de l’enfant acteur de ses apprentissages.

Que dire de tous ces acronymes ridicules qu’affectionne tant l’Éducation nationale ?
PPRE, PAP, APC… dont les titres grandiloquents n’ont d’égal que leur inefficacité.

Que dire du comportement des élèves ?
Petits êtres jouissifs dont le goût de l’effort confine au néant.

Que dire du comportements des parents ?
Intrusifs et consommateurs d’école. Tellement attachés à l’épanouissement de leur enfant qu’ils n’hésitent pas à fouler aux pieds l’enseignant.

Que dire de l’institution et de son rôle actif dans la culpabilisation systématique de son personnel ? Le fameux “pas de vagues” qui réduit au silence les enseignants les plus consciencieux.

Je ne parle pas de toutes ces formations ineptes aux intitulés éloquents :

  • Enseigner les mathématiques par le jeu
    (eh bien non l’apprentissage n’est pas un jeu),
  • Gérer les comportements difficiles sans stigmatiser
    (gérer les comportements déviants ne fait pas partie de mes compétences sinon j’aurais été infirmière en psychiatrie),
  • Mettre en place une Pédagogie différenciée
    (jolie pirouette de notre institution pour justifier le manque de moyens matériels et humains),
  • L’inclusion à l’école
    Encore une beau principe (je vous renvoie à la fameuse pirouette) qui dissimule une réalité bien différente des valeurs qu’elle prétend défendre : le manque cruel de structures susceptibles de répondre aux besoins spécifiques de nos enfants porteurs de handicap. Je dis NOS enfants parce que je suis aussi la mère d’un enfant en situation de handicap.
    L’inclusion oui, pas à n’importe quel prix.

Je ne remercierai jamais assez les enseignantes qui accompagnent mon enfant et qui font ce qu’elles peuvent faute de moyens. Elles subissent elles aussi le désengagement de l’état sur la question du handicap. Il est vrai que nous pouvons aller à la pêche aux infos sur des plateformes dédiées (encore du bricolage). On abandonne les enseignants à leur triste sort, esseulés et culpabilisés.

Je finirai par la sacro-sainte bienveillance qui revient aussi sûrement qu’un boomerang dans tous les discours de nos bien – pensants. Je cite :
Tu n’as pas su le prendre”,
II faut le comprendre il a des troubles du comportement”,
Tu dois l’entourer de bienveillance(même quand le petit récalcitrant te traite de grosse merde devant toute la classe et les parents d’élèves le jour d’une fête d’école).

Et cette agression violente dont j’ai été victime (gifle) et pour laquelle j’ai dû déposer plainte (SEULE) et attendre la convocation du tribunal pendant les congés d’été.
En retour de cette agression : une simple lettre d’excuses.

Vous l’aurez compris, l’école va mal, les enseignants aussi.

— École élémentaire, 25 ans d’ancienneté

L’auteur de ce témoignage autorise la reprise de ce témoignage par la presse.